CHATEAU DE LEUGNY

Carte de Cassini
Carte de Cassini
Cadastre Napoléonien
Cadastre Napoléonien
Plan cadastral
Plan cadastral


Historique

Relevant du Duché de Luynes, Leugny est un ancien fief rattaché en 1639 à la paroisse d’Azay-sur-Cher, sous la mention de « le fief de Leugny et Thuillay », pour un revenu de vingt-huit livres.

Le premier seigneur connu selon le CARRÉ BUSSEROLE, aurait été vers 1125 un certain Garin GONNELLE, chevalier, connu pour un différend avec les religieux de Marmoutier, suivi en 1228 par Geoffroy de LEUGNY, chevalier.

Au XIVème siècle

Arnoul du PUY et sa femme Jacqueline se disent « Seigneur et Dame de Leugny ».

Leur succession, le 15 juin 1427, fut partagée en 3 entre leurs enfants :

Anne du PUY épouse de Jean des QUARTES, écuyer seigneur du Grand et Petit Mauny et Bas Thuilay,

Pétronille du PUY, voulant entrer en religion.

Jean du PUY, seigneur de la Roche-Saint-Quentin, marié tardivement en 1427 à Eléonore de la PAU, dame de la maison de la reine Marie d’Anjou, eut pour sa part la maison noble de Leugny, sa métairie et le fief du Haut Thuillay. Il céda à son beau-frère six ou sept arpents de terre en amont de la métairie de Leugny pour qu’il puisse y construire une maison ayant vue sur la rivière, qui ne devra pas être appelée ni Leugny, ni Thuillay, mais le Grand-Mauny.

 

Jean du PUY, né vers 1375, trésorier du roi Charles VI, puis « maître clerc à la chambre du roi » Charles VII, est décédé en octobre 1439, sans enfant. Il fut enterré dans la chapelle Saint-Christophe de Saint-Martin-de-Tours, qu’il avait fondée. Le partage de ses biens eut lieu le 23 octobre 1439. Il avait été anobli par Charles VII en février 1403.

 

C’est l’une de ses nièces, Aliénor du PUY, qui hérite en 1472, outre plusieurs maisons à Tours, des hôtels, terre, moulin, bois, rentes, terrages de Leugny et généralement tout ce que le dit feu du Puy avait, tenait et possédait au temps de son vivant en la paroisse d’Azay-sur-Cher.

L’alliance des du PUY et des des CARTES ou des QUARTES explique que l’on trouve, en 1467 et 1487, deux Jean DESCARTES comme « seigneur de Leugny et Mauny » (Mauny ou Mosny comme sur la carte de Cassini).

Leugny passe à Louis BONENFANT en 1539.

Au XVIème siècle

En 1550 : Léonard RANCHER épouse Anne BOHIER le 15 janvier 1595, fille du seigneur de Saint-Martin-le-Beau. Léonard RANCHER, baron de la Gitonnière, de Leugny à Azay-sur-Cher, et autres lieux, est « conseillé d’état et maitres des comptes de Paris ».

En 1576 : Antoine RANCHER, chevalier, maître des requêtes de l’hôtel du roi.

A la fin du XVIème

Louys CHARDON, seigneur de Luigny (sic), est cité comme parrain à Azay-sur-Cher le 2 avril 1582 à Azay-sur-Cher. Il baptisera son fils Louis le 23 janvier 1583 à Azay-sur-Cher, né de son mariage avec Florentine DESHAYES.

Au XVIIème siècle

La terre de Leugny appartient à François CLAVIER ; celui-ci avait le droit de faire aborder en bac sur les 2 rives du Cher. Mais les seigneurs de Leugny prirent souvent ombrage de ce droit, ce qui motiva un procès long et dispendieux, avec CLAVIER père et fils. François CLAVIER suivit cette affaire avec acharnement.

Carte du duché de Choiseul établie en 1770
Carte du duché de Choiseul établie en 1770

Au XVIIIème siècle

Le 25 mars 1720, René Joseph CLAVIER, son fils, rendit aveu à « haut et puissant seigneur, messire Charles Philippe Albert duc de Luynes » pour les fiefs de Leugny et Thuillay.

Il décède à Azay-sur-Cher le 28 juillet 1736, à l’âge de 65 ans : sur son acte de décès figure la mention « seigneur de Leugny ».

Acte décès René Joseph Clavier
Acte décès René Joseph Clavier

Ces deux terres furent vendues, après sa mort, par ses héritiers, le 15 juillet 1740 à André PORTIER.

1740

André PORTIER père acquiert les terres de Leugny le 15 juillet 1740. A cette époque, deux anciens châteaux existent sur les terres de Leugny : Mauny et Leugny.

André PORTIER père, (repère 1 sur la généalogie ci-après), greffier au baillage de la ville d’Amboise et bourgeois de cette ville, marié à MEAUZE Suzanne le 29 août 1701 en l’église de St-Denis-Hors à Amboise, achète l’ensemble pour son fils, également prénommé André.

1747

André PORTIER fils, (repère 2 sur la généalogie ci-après) « écuyer, contrôleur ordinaire des guerres, seigneur châtelain de Leugny », garçon » (le terme de garçon utilisé dans l’acte de décès fait référence au fait qu’il était célibataire).

Contrôleur-Inspecteur des travaux lors de la construction de la place royale de Bordeaux, réalisée par Ange Jacques GABRIEL (1698-1782) de 1735 et 1755, dont il avait été l’élève.

C’est à lui que l’on attribue le début de la reconstruction du château actuel de Leugny, principalement les 2 bâtiments latéraux de la cour d’honneur, et le début des travaux du logis principal qui sera achevé par son neveu Ambroise RIBOT.

Acte décès André Portier
Acte décès André Portier

Il décède au château de Leugny le 15 juin 1770, à l’âge de 68 ans, en présence de maître David PORTIER conseiller du roi, garde marteau, dans la maitrise particulière des eaux et forêts d’Amboise et Montrichard, son frère.

C’est un officier établi dans chaque maîtrise particulière des Eaux & forêts, pour garder le marteau avec lequel on marque le bois que l’on doit couper dans les forêts du roi ou les bois réservés à la marine.

 

Par acte en date du 7 avril 1772, devant maîtres BELIN et Pierre-Nicolas DREUX, notaires royaux à Tours, résidant à Amboise, sa succession a été partagée par acte sous seing privé du 30 juin 1770, contrôlé à Amboise le 25 juillet. Le fief et principal manoir de la châtellenie de Leugny, ainsi que la majeure partie du domaine, ont été échus à François PORTIER, frère du défunt, négociant à Poitiers.

 

Par acte du 5 juillet 1770, devant maître Jacques-Louis DECHAUX, notaire à Amboise, François PORTIER (repère 3 sur la généalogie ci-après) a revendu l’ensemble à Ambroise RIBOT (repère 4), son neveu par alliance avec la fille de sa sœur Suzanne.

1770

Ambroise RIBOT : acquiert l’ancien château de Leugny et ses dépendances le 5 juillet 1770.

Un marché daté du 3 décembre 1774, issu du minutier de l’étude de Jacques Louis DÉCHAUX, notaire royal à Amboise, atteste du commanditaire, de l’architecte et du maçon chargé de la construction du château.

 

Ambroise RIBOT, avocat au parlement, receveur du grenier à sel d’Amboise, procureur ducal du duché d’Amboise et intendant du château de Chanteloup depuis le 8 mai 1748, où il réside.

 

Il fait appel à Louis Denis LE CAMUS (1715-1797), élève de Jean-Charles GARNIER d’ISLE (a) et de Jacques V GABRIEL (b), qui est « architecte de l’intendance de Paris », et a réalisé des aménagements au château de Chanteloup pour le duc de Choiseul : en particulier il a conçu une fabrique de jardin (c) : la célèbre pagode édifiée en 1775.

 

Le marché de 1774 est passé entre Ambroise RIBOT et Joseph MONSENARGUE, dit La Marche, maçon à Amboise.

 

Ce marché concerne le corps de logis principal.

(a) Jean Charles GARNIER d’ISLE : contrôleur général des Bâtiments, jardins et manufactures et dessinateur des Jardins du roi Louis XV.

(b) Jacques V GABRIEL : élève et parent de Jules Hardouin MANSART qui fut premier architecte du Roi en 1735, et directeur de l’Académie royale d’architecture.

(c) Une fabrique de jardin est une construction ornementale prenant part à une composition paysagère au sein d’un parc ou d’un jardin. Elle sert à ponctuer le parcours du promeneur ou à marquer un point de vue pittoresque. Prenant les formes les plus diverses, voire extravagantes, les fabriques évoquent en général des éléments architecturaux inspirés de l’antiquité, de l’histoire, de contrées exotiques ou de la nature.

Construit en pierre de taille de tufeau, le corps de logis principal comprend au nord : un soubassement, un rez-de-chaussée surmonté d’un étage carré et un comble. Au sud, le rez-de-chaussée se situe au niveau de la cour. Les façades nord (vers le Cher) et sud sont rythmées par sept travées, trois au centre et deux de chaque côté, séparées par des pilastres à bossages continus. Les faces latérales comportent quatre travées.

 

Les hautes portes fenêtres du rez-de-chaussée sont surmontées d’entablements formant consoles, ornées de fleurs rondes. Les baies de l’étage ont la même largeur que celles du rez-de-chaussée, mais sont beaucoup moins hautes. La corniche est surmontée d’une balustrade qui masque en partie le toit à longs pans et croupes, couvert en ardoise. Les communs sont orientés perpendiculairement au corps de logis ; situés de part et d’autre de la cour d’honneur, ils sont également construits en pierre de taille et présentent des entablements analogues à ceux du corps de logis. Leur toit brisé à longs pans et croupes est couvert en ardoise.

 

Un plan masse de 1770 montre deux bâtiments qui ont été construits à l’époque d’André PORTIER, entre 1740 et 1770, ils auraient été conservés pour constituer les communs actuels.

 

Ces communs, ici, ne forment pas un enclos de part et d’autre de la cour d’honneur, mais sont simplement constitués par deux bâtiments parallèles, avec toit à la « Mansard », et dont beaucoup d’ouvertures sont aveugles ou peintes en trompe-l’œil. A chacune des extrémités méridionales, suivant le même axe, existait une orangerie où venaient aboutir trois grandes allées de tilleuls. A l’ouest, la grange occupe la partie centrale, laissant voir la magnifique charpente, tandis qu’à l’autre bout, éclairée par trois grandes fenêtres semblables à celles du logis, était aménagée la chapelle. Les communs devaient également être réservés au logement du personnel.

 

Ces deux ailes sont reliées au corps principal du bâtiment par deux petites terrasses munies d’estrades, de chaque côté.

 

Il revendra le château le 7 septembre 1779, château qualifié de « nouvellement construit » sur l’acte de vente à Monsieur JUCHEREAU de SAINT-DENIS.

A noter :

Mauny est devenu Mosny et une partie des bâtiments visibles sur les plans de 1770 ont disparu,

L’agencement des jardins, déjà très élaborés sur ce document, est représenté dès 1820, et arrive jusqu’en bordure de la rivière du Cher.

Le parc et les jardins seront réaménagés par les frères Denis et Eugène BUHLER*, célèbres architectes-paysagistes, dans la seconde moitié du XIXème siècle, en collaboration avec Edouard ANDRÉ.

 

* En Indre-et-Loire : jardin des Prébendes d’Oé, le jardin de l’archevêché de Tours, Château de Cangé de Saint-Avertin, Jardin François Sicard de Tours, Château d’Azay-le Ferron…, et aussi le jardin de « la tête d’or » à Lyon.

1779

Louis-Barbe de JUCHEREAU de SAINT-DENIS

Lieutenant- colonel d’infanterie - 1er Marquis de Saint-Denis - Chevalier de Saint-Louis.

Né le 23 mars 1741 à Trou du nord (Haïti), (son père était né à Montréal - Québec le 6 août 1696), marié le 12 février 1774 à Paris à Hélène Mélanie de BARBANÇOIS-VILLELONGIS.

Décédé à Tours le 28 juillet 1833 au 7, rue de Buffon à Tours.

Propriétaire du château de Leugny de 1779 à 1793
Propriétaire du château de Leugny de 1779 à 1793

Leur fils Louis Amédée Vincent, né au château de Leugny à Azay-sur-Cher le 31 décembre 1782, épouse le 25 mai 1816 à Tours, Clémentine Luce de TRÉMONT. Il est officier supérieur et à la fois Chevalier de Saint-Louis et de la Légion d’honneur. Il est décédé le 16 novembre 1858 au château de la Guignardière, commune d’Avrillé (Vendée).

 

Il comparut comme « Seigneur Chastelain de Leugny » à l’assemblée électorale de la noblesse de Touraine.

1793

Le château est acquis par Jean-Claude MOYNAT le 8 janvier 1793 (19 Nivôse an 01 de la Révolution).

Nous retrouvons, en ces périodes troublées de la Révolution française, une personne portant ce nom. Sans pouvoir faire de lien formel entre les 2 personnes, nous trouvons à la même période, dans le cadre du « procès des hébertistes » les traces de son interrogatoire par le « Comité de salut public » en 1794 (an02) contre des banquiers et, en particulier, celui de Pierre Jean Berthold dénommé PROLY.

1794

Leugny est revendu le 5 janvier 1794 (16 Nivôse an 02) à Mme Olive Rose Jacqueline MONTANT (ou Olive Rose Jacqueline MONTAUT ou Bernard de COUBERT). La singularité du prénom nous a guidés dans nos recherches sur cette personne.

Nous avons retrouvé sur le site Gallica (Bibliothèque Nationale de France).

 

L’existence d’un contrat de mariage, auprès de Maître REGNAULT Eugène Louis, au nom de « Olive Rose Jacqueline » MONTANT (ou MONTAUT) avec GOMBAULT Louis Michel en date du 23 juin 1779,

Un acte de baptême d’un fils prénommé François Hipolite Olivier en date du 28 avril 1871 à Paris en l’église Saint-Eustache, le père déclaré « commis chef au bureau de liquidation du trésor royal ».

 

Un acte de baptême d’un fils prénommé François Auguste en date du 30 janvier 1784, même lieu, où le père est déclaré « chef de bureau des liquidations au trésor du Roi ».

 

Olive Rose MONTAUT de COUVERT remariée le 19 janvier 1794 à Paris avec Charles Martin DOYEN, régent de la Banque de France, Conseiller de Paris (à noter que ce mariage intervient le même mois que l’acquisition du château de Leugny).

 

Olive Rose Jacqueline, fille de MONTAULT Rose et d’un père inconnu, a été reconnue par Jacques Bernard de COUDERT. Elle semble avoir utilisé, suivant les circonstances, le nom de sa mère ou celui de son père adoptif : MONTAUT lors de son premier mariage, BERTRAND de COUDERT lors de la naissance de ses fils et du second mariage.

A partir des références du contrat de mariage, cité ci-dessus, des adhérents de l’Antenne parisienne du CGDT ont effectué des recherches au CARAN (Centre d’Accueil et de Recherche des Archives Nationales)  permettant de comprendre :

Qui était Olive Rose Jacqueline MONTAUT,

Comment a-t-elle eu les moyens d’acheter le château de Leugny, compte tenu de ses origines,

 

Avec qui s’était elle remariée, et sous quelles conditions.

Nota : les actes complets de plusieurs pages nous ont été communiqués et sont archivés.

 

Les deux contrats de mariage et celui de la donation ont fourni les explications suivantes :

 

Le contrat de mariage du 23 juin 1779 entre Louis Michel GOMBAULT et Olive Rose Jacqueline MONTAUT nous apporte des informations sur l’âge de l’épouse, 15 ans au moment du mariage, et sur l’existence d’une donation en sa faveur de 30.000 livres*.

 

* Le convertisseur des monnaies anciennes nous donne en équivalant Euros : 500.000 €

La donation du « Marquis de SOUVRÉ » à Olive Rose Jacqueline MONTAUT a fait l’objet d’un acte notarié en date du 22 juin 1779. Le montant de 30.000 £ ne peut être comparé au pouvoir d’achat de son équivalent aujourd’hui, la somme est certainement beaucoup plus importante.

 

L’acte notarié précise que la donation a été faite en présence de « très haute et puissante dame Madame Félicité de Sailly veuve de très haut et puissant seigneur Monseigneur François Louis le Tellier comte de Rebenac, Marquis de Souvré et de Louvois, … ».

Félicité de SAILLY est la troisième épouse du petit-fils de François Michel Le TELLIER marquis de Louvois (18 janvier 1641 à Paris – 16 juillet 1691 à Versailles), ministre de Louis XIV.

Le contrat de mariage du 3 Nivôse de l’an 02 de la République (19 janvier 1794), entre Charles Martin DOYEN et Olive Rose Jacqueline MONTAUT, apporte des précisions sur l’évolution du nom de l’épouse :

  • Une annotation marginale précise que le nom a été modifié de MONTAUT à BERNARD, nom de son père le 27 Pluviôse an 06,
  • Qu’elle a divorcé d’avec Louis Michel GOMBAULT le 21/03/1793.

Article de Claude CHRIST, adhérent du Centre Généalogique de Touraine.

Habitant la commune d’Azay-sur-Cher, il à choisi de faire découvrir l’histoire du château de Leugny, avec l’accord de son propriétaire M. Joseph DARRASSE.



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