Le plateau qui sépare les vallées du CHER et de l'INDRE est connu sous le nom de Champagne tourangelle. Le sol en argile sablonneux recueille les eaux pluviales qui se filtrent et s'y amassent sans se perdre - une grande quantité de sources se font jour à la base des coteaux, aussi bien dans la vallée du CHER que dans celle de l'Indre. Les Romains ne manquèrent pas de mettre à profit cette disposition naturelle et de recueillir dans un seul canal les différentes sources, chacune trop faible pour être utilisée.
Après avoir réuni plusieurs fontaines très voisines dont les eaux venaient se perdre dans un petit vallon, à 1 kilomètre à l'ouest de Bléré, ils purent facilement établir leur aqueduc, en suivant la vallée du CHER qui les menait directement à TOURS, tout en gardant une pente aisée à maintenir. La pente de cet aqueduc est de 0,281 m par kilomètre. Elle correspond sensiblement à celle du CHER qui est de 0,265 m. Le bassin qui a été nommé, à tort, LES GRANDES FONTAINES (le terme « fontaine » étant synonyme de source), n'est probablement pas autre chose qu'un réservoir détruit.
Dans un curage pratiqué en 1860 on a pu constater qu'il était maçonné, il contenait des débris de toutes sortes Ce réservoir devait être alimenté par plusieurs canaux creusés dans le roc des pentes voisines et que l'on peut reconnaître grâce aux regards de curage et d'entretien pratiqués à l'époque de la construction. Du réservoir principal partait un conduit se dirigeant sur FONTENAY, auquel se joignait un canal moins important venant des FONTAINES SAINT-MARTIN.
C'est en 1967 et 1968 qu'une portion importante de cet aqueduc concernant la commune de Bléré a été découverte et étudiée. Des morceaux du tronçon ont été mis au grand jour dans un secteur où le tracé du conduit, mais surtout le captage, était présumé mais inconnu. En fait, on connaissait des vestiges visibles dans le parc du château de Fontenay (d'où son nom) : quatre piles et des morceaux de radier indiquant une modification de direction depuis le Cher qu'il longe, vers le vallon de Fontenay, plus au Sud.
La longueur estimée de cet aqueduc est d'environ 25 km. Six communes sont situées sur son tracé : Bléré, Athée-sur-Cher, Azay-sur-Cher, Véretz, Larçay et Saint-Avertin.
En 1967, M. et Mme Berbier, à qui l'on doit de nombreuses études sur le patrimoine de Bléré, sur indication d'un exploitant agricole, M. Marteau, ont dégagé le long du chemin rural (CR 9) une portion de la partie supérieure de l'aqueduc sur laquelle s'était heurté le soc de la charrue.
Des fouilles ont débuté, lesquelles se sont poursuivies en 1968. L'ensemble se présente comme un conduit rectangulaire, sommé d'une voûte, de 50 cm de large et 1.00 m de haut. Les blocs calcaires sont maçonnés au mortier de chaux.
Cet aqueduc se trouvait tantôt enterré, tantôt porté par des piles, tantôt creusé dans le tuffeau, au pied du coteau. Un nivellement a été réalisé tout au long du parcours de l'aqueduc et des mesures ont été systématiquement réalisées sur les vestiges de radier du canal afin de procéder à l'étude du débit potentiel. Avec une pente moyenne de 1,17 m par kilomètre, les calculs effectués avec la formule de Bazin nous donnent un débit allant de 2.300 m³ d'eau par jour au niveau le plus bas à 5.400 m³ au niveau le plus haut.
L'aqueduc poursuivait son parcours sur une distance de 26 km jusqu'à Saint-Avertin avant de traverser le Cher pour alimenter la ville de Tours. Maçonné dans les sections à l'air libre ou taillé dans le tuffeau, il courait au bas du coteau 3,00 m au-dessus de la route actuelle.
L'aqueduc franchit au moins dix-huit vallons au moyen de ponts dont la longueur varie d'une trentaine à plus d'une centaine de mètres. Six ponts sont encore visibles. Les mieux conservés sont ceux de Fontenay à Bléré et du Coteau à Azay-sur-Cher : du premier est conservé un mur bahut et deux piles avec des départs d'arcades ; du deuxième subsiste l'intégralité de l'ouvrage jusqu'au tablier.
Enfin, la plus importante énigme de cette étude concerne le franchissement de la vallée du Cher. Pour gagner la ville antique de Tours, l'aqueduc devait faire un coude au niveau de Saint-Avertin et franchir la vallée du Cher pour rejoindre l'agglomération grâce à un pont, un siphon, ou tout autre ouvrage de franchissement. Mais actuellement, aucun vestige, document d'archive ou témoignage ne vient confirmer cette hypothèse.
Espace des Grandes Fontaines
Route de l'Herpenty